Les membres masqués de l'OTAN
Depuis la disparition de l'URSS et avec elle celle du Pacte de Varsovie, on observe un expansionnisme exponentiel et de plus en plus agressif de l'OTAN vers les frontières de la Fédération de Russie, piétinant au passage les promesses occidentales de préserver une neutralité des anciennes républiques socialités soviétiques ainsi que de la fonction dite "défensive" de l'Alliance, qui déjà dans sa chronologie est contestable puisqu'elle précède en réalité (avril 1949) et provoque la création du Pacte de Varsovie (mai 1955) et non l'inverse comme le pense la plupart des occidentaux formatés par la propagande de guerre victimaire de l'Oncle Sam.
Aujourd'hui, l'OTAN est confronté aux puissances militaire et diplomatique restaurées de la Fédération de Russie grâce auxquelles Moscou peut faire valoir à nouveau ses préoccupations sécuritaires et imposer atour de son espace vitale des lignes rouges à ne pas franchir par ses adversaires potentiels (ces lignes rouges étant de plus en plus importantes au fur et à mesure qu'augmentent les capacités des armements modernes).
Certains diront ici que la Russie en demandant l'instauration d'une "glacis" stratégique neutre devant ses frontières outrepasse le droit des Etats à choisir librement leurs propres alliances militaires, ce que Stoltenberg, le secrétaire Général de l'OTAN a encore voulu nous présenter comme un droit inaliénable lors de sa dernière conférence de presse du 26 janvier.
Or l'histoire même des relations internationales étasuniennes nous rappelle que refuser l'expansion militaire d'un adversaire potentiel dans sa "zone d'influence" frontalière est légitime et il suffit pour exemple de se souvenir de la crise des missiles de Cuba en 1961. Et ce droit à garantir un glacis sécuritaire autour de ses frontières est même, comme l'a rappelé Sergeï Lavrov le Ministre russe des Affaires Etrangères, dans le droit international par les "Déclarations d'Istanbul et d'Astana de l'OSCE" qui en 2010, ont inscrit l'obligation de tout pays de ne pas renforcer sa sécurité aux dépens d'autres États (accords votés par les 56 États participants et de 12 partenaires de l'OSCE) :
- "La sécurité de chaque État participant est indissociable de celle de tous les autres. Tous les États participants sont égaux en droit en matière de sécurité. Nous réaffirmons le droit inhérent à chaque État participant d’être libre de choisir ou de modifier ses dispositions en matière de sécurité, notamment les traités d'alliance, à mesure qu’ils évoluent. Chaque État a également le droit à la neutralité. Les États participants respecteront les droits de tous les autres à cet égard. Ils ne renforceront pas leur sécurité au détriment de celle des autres."
Mais voilà, conscient que cette légitimité sécuritaire fait obstacle à son expansion hégémonique, l'OTAN a inventé des statuts bâtards d' "alliés non intégrés" qui lui permettent d'avancer factuellement ses pions, ses exercices et contrats d'armement militaires sans marquer juridiquement ses nouveaux territoire; "partenaire pour la Paix", "partenaire "nouvelle opportunité"", "partenaire renforcé" etc...
Aujourd'hui dans la turbulence géopolitique Est-Ouest que la crise ukrainienne, organisée par Washington a provoqué, l'OTAN vient de faire encore évoluer en catimini sa définition identitaire :
Ceci revient à dire que si le statut de "membre" est un marqueur d'une intégration juridique de son territoire dans l'OTAN, le statut de "partenaire" est quant à lui le marqueur d'une intégration factuelle de l'OTAN dans son territoire.
Autrement dit c'est "bonnet blanc et blanc bonnet" pour la Russie qui observe cet espace global atlantiste arriver en butée de ses frontières fédérales !
Erwan Castel
Voici un article pertinent de Karine Bechet Golovko évoquant justement que la psychose hystérique d'une prétendue invasion russe est organisée entre autres mesures russophobes pour accélérer le rapprochement militaire de ces "partenaires" dont certains, voisins de la Russie, hésitent entre l'engagement et la neutralité...
Source de l'article: Russie Politics
La question de l'élargissement de l'OTAN est plus que jamais à l'ordre du jour et le recours au mantra de la "menace russe" est un prétexte fabriqué sur mesure. En ces temps troublés, cette structure est dans l'obligation de prouver sa force et avec la fin de la Guerre froide, elle doit prouver l'importance de son existence par l'importance d'un "nouvel-ancien" ennemi. Bref, l'on est soit avec elle, soit contre elle. Et cette question va bien au-delà de l'Ukraine ou de la Géorgie, elle touche même, dans sa radicalisation actuelle, principalement les pays qui pensent pouvoir rester neutres. Et dans son combat pour la globalisation, le monde Atlantiste ne peut plus se permettre l'existence d'une neutralité et la Russie est utilisée comme catalyseur.
L'OTAN fait clairement passer le message : la neutralité n'est plus possible aujourd'hui. Et pour cela, la pression est à nouveau dirigée vers deux pays symboliques et autrement plus intéressants que l'Ukraine et la Géorgie, à savoir la Suède et la Finlande.
Ainsi, le Secrétaire général de l'OTAN d'insister, car ces déclarations ont déjà été faites par Victoria Nuland : les portes de l'OTAN sont grandes ouvertes à la Finlande et à la Suède. Ce 24 janvier, une rencontre au siège de l'OTAN a été organisée avec les ministres des Affaires étrangères suédois et finlandais, concernant le renforcement de la coopération "face à la menace russe". Un peu plus tard, le ministre des Affaires étrangères suédois a déclaré que, pour l'instant, la Suède n'est pas prête à demander son entrée dans l'OTAN.
Cette rencontre s'inscrit parfaitement dans la ligne américaine concernant les garanties de sécurité demandées par Moscou, puisque le porte-parole du Département d'Etat, Ned Price, a déclaré dans son point presse, que les Etats-Unis ne feraient aucune concession. Or, la question, fondamentale pour la Russie, de la fin de l'extension de l'OTAN a été refusée d'emblée par les Américains.
Si finalement une réponse écrite promet d'être envoyée ces jours-ci, rien ne dit qu'elle permettra de changer la donne. La situation est, en fait, parfaitement claire : nous sommes dans une phase de conflit actif.
Karine Bechet-Golovko