Le 1er contact


Le 11 juillet, à l'initiative du président ukrainien Zelensky un entretien téléphonique a eu lieu entre lui et le président russe Poutine pour "aborder les questions liées à la résolution du conflit dans le sud-est de l'Ukraine et du travail commun pour le retour de personnes détenues des deux côtés», a précisé Dmitri Peskov, le porte-parole du Kremlin.

Certains parlent de "première pierre" posée à la résolution pacifique du conflit. Perso je ne vois dans ce contact réalisé par un président ukrainien dont la popularité est en chute libre qu'une opération de comnnunication électoraliste menée à la veille des élections législatives ukrainiennes. En effet le bloc de l'ancien président Porochenko, a "repris du poil de la bête" encouragé par les doutes et les déceptions en cascade suscités par les premières semaines d'exercice présidentiel de Zelensky, menace de garder le contrôle de l'assemblée nationale "Verkhona Rada". 

Or Zelensky, qui été élu principalement sur ses promesses de paix dans le Donbass, tente à mon avis de relancer cet argumentaire électoral, en créant, via cet entretien téléphonique un buzz politique destiné à relancer les espoirs de paix et la confiance envers lui.


De son côté le Kremlin, fidèle à sa diplomatie d'ouverture a décidé de jouer le jeu du dialogue et de répondre au président ukrainien par un "pourquoi pas" l'invitant également à de nouvelles négociations autour du format de Minsk ou de tout autre format acceptable.

Dans cet échange Ukraine/Russie et malgré un discours qui se veut médiatiquement fort du fait de sa victoire électorale éclatante (+ de 70%) et du soutien politique des ténors du bloc occidental, Zelensky se présente plutôt comme un mendiant aupès d'un Poutine aguerri en politique qui le laisse venir à la table des discussions, que ce soit pour de réelles négociations constructives ou un nouveau bras de fer. Car la réalité est que Zelensky sent que la vague populiste qui l'a porté au sommet de l'Ukraine diminue dangereusement du fait des déceptions populaires, des réactions de l'opposition et ceci à quelques jours d'élections législatives qui sont vitale pour l'exercice de son pouvoir. De plus, il se doit de tenir compte des résultats des pro-russes ukrainiens qui sont aujourd'hui la troisième force politique du pays avec 15% des voix exprimées aux dernières présidentielles (auxquelles il faudrait rajouter les voix censurées par Kiev des ukrainiens de Russie, et celles qui n'ont pas osé s'exprimer dans Donbass sous la botte de l'armée ukrainienne). Un résultat très important, supérieur à ceux des nationalistes et même de Timochenko, malgré la répression engagée contre les pro-russes en Ukraine, et que Zelensky doit respecter pour tenter de compenser la perte de son électorat initial.

Et à cette vision plutôt pessimiste des objectifs réels de cet entretien entre les 2 présidents russe et ukrainien, il faut rajouter que le volant ukrainien des négociations est sérieusement bloqué par ses parrains et mentors occidentaux que ce soit les USA, l'UE et surtrout l'OTAN qui ne veulent pas et ne voudront jamais lâcher leur proie ukrainienne.



L'ombre de l'Oncle Sam et de l'OTAN sont plus qu'évidentes dans le discours et les doléances de Zelensky, tant dans le rajout du dossier des marins ukrainiens arrêtés lors de l'incident de Kertch que dans la proposition d'élargir le "format Normandie" de Minsk (Ukraine-Russie-Allemagne-France) aux USA et à la Grande Bretagne (lesquels en réalité doivent plutôt s'invitent aux accords de Minsk via Kiev). 

Cette dernière proposition d'inviter Washington et Londres aux négociations de Minsk est tout simplement symptomatique de la volonté, en internationalisant la diplomatie d'un conflit qui est resté pour le moment régional, de faire des accords de Minsk un ring de boxe entre l'OTAN et la Russie, ou plutôt vu le déséquilibre des parties représentées, un nouveau procès anti-russe de l'inquisition occidentale.

Le conflit dans le Donbass ne peut être réglé pacifiquement et de façon équilibré que par l'instauration d'un dialogue trilatéral entre la Russie, l'Ukraine et aussi et surtout les Républiques Populaires de Donetsk et Lugansk avec lesquelles Kiev refuse toujiours de discuter directement. Tout pays tiers qui s'assierait à la table des négociations devariat être neutre tant sur le plan politique que sur le plan militaire pour être légitime dans un rôle de médiateur ou de garant (ce qui est loin d'être le cas aujourd'hui avec la France et l'Allemagne, et le serait encore moins avec les USA et le Royaume Uni).

Quel intérêt pour Zelensky d'accepter que les USA et la Grande Bretagne s'invitent à une table de négociations alors qu'ils ne veulent pas discuter avec la Russie et encore moins les Républiques de Donetsk et Lugansk ? 

Si la Russie a accepté le principe d'un dialogue et d'étudier les propositions ukrainiennes concernant les formats pôssibles des négociations futures, c'est certainement à la fois pour ne pas être accusée de vouloir saboter des efforts présentés officiellement en faveur d'une paix que beaucoup espèrent, mais aussi et surtout pour inviter publiquement le nouveau président ukrainien à dévoiler son vrai jeu et faire tomber définitivement son masque de "serviteur du peuple" et endosser celui de "laquais des USA".

Je pense pour ma part qu'une négociation en cas de guerre n'est envisageable qu'à l'issue d'une victoire militaire de l'une des 2 parties, ce qui avait d'ailleurs était le cas en 2014 et 2015 lorsque Minsk 1 et 2 ont mis fin aux déroutes successives de l'armée ukrainienne dans les chaudrons frontaliers et d'Iliovaisk, les combats de l'aéroport et le chaudron de Debalsevo. 

Aujourd'hui les compteurs sont remis à zéro...


Erwan Castel 

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