Le temps des razvedkas
« Comment un homme peut dire ce qu’il devrait faire lui-même
s’il est ignorant de ce que fait son adversaire ? »
Antoine de Jomini (1779-1869)
s’il est ignorant de ce que fait son adversaire ? »
Antoine de Jomini (1779-1869)
La recherche du renseignement a toujours été une priorité obscesionnelle de tout commandement militaire en temps de guerre mais aussi en temps de paix. Déjà au VIècle siècle avant notre ère, le général chinois et théoricien militaire Sun Tsu énoncait que « Qui ne sait recourir aux éclaireurs sera incapable de tirer parti des avantages du terrain », et si les méthodes et les technologies ont évolué depuis, le besoin du renseignement militaire reste plus que jamais prioritaire et toujours articulé autour des unités humaines spécialisées dans sa recherche.
En dehors de l'usage populaire exagéré désignant comme "unité spéciale" de type "DRG" (unité de reconnaissance et diversion) les sections de reconnaissance classiques des unités d'infanterie, les forces armées des républiques de Donetsk et Lugansk ont développé de vrais groupes de "razvedka", ces Unités de Recherche Humaine spécialisées dans les missions de reconnaissance et d'aaction dans la profondeur de le ligne de front ennemie.
Ces unités d'élite sont formées et entrainées à la fois aux standards de l'armée russe vers laquelle se tend depuis 2015 la normalisation des milices républicaines mais aussi à l'aune de l'expérience du combat réel particulier imposée par cette guerre de position qui sévit dans le Donbass depuis 5 ans sur près de 400 kilomètres d'une ligne de front enterrée dans un réseau diversifié de tranchées, casemates et champs de mines.
Voici une courte vidéo évoquant l'entrainement et le travail de ses unité de renseignement militaire qui consolident la défense du Donbass quotidiennement par les missions d'infiltration réalisées sur la ligne de front.
Au niveau de notre bataillon, les missions qui nous sont confiées sont également préparées à l'aune des renseignements recueillis par des unités spécialisées qui, sur le terrain doivent sans cesse confirmer ou infirmer, ceux collectés par les radars terrestres ou les drones d'observation par exemple.
Et il ne faut pas croire que parce que la ligne de front est figée que les activités et le renseignement le sont également, bien au contraire car les positions de combat, tranchées, casemates, bunkers, passées de liaison, réseaux de mines et parfois de caméras de surveillance sont en constante évolution.
Les mines sont d'ailleurs, avec les snipers, le principal souci de ces unités sortant des tranchées, tant il en a été posées depuis 5 ans un peu partout par chaque belligérant et souvent pendant les premiers mois du conflit de façon plutôt... anarchique sans inventaires cartographiés. Et chaque mois, des pertes dues aux mines terrestres sont enregistrées de de part et d'autre du front au sein des unités de razvedka, surtout les ukrainiennes qui engagent très frequemment des reconnaissances offensives.
Soldat ukrainien sautant sur une mine antipersonnelle "PMN"
lors d'une mission de reconnaissance en avril 2019
Malgré ces dangers accrus, la recherche humaine du renseignement doit se poursuivre afin
- de définir précisèment la nature les forces ennemies et leurs évolutions qui peuvent prévenir une opération à venir ou révéler un axe majeur d'attaque potentielle,
- de contrer des opérations d'infiltration ennemies dans notre système défensif
- de miner (ou déminer) des couloirs d'accès du champ de bataille
- de répérer, détruire ou capturer les postes avancés ennemis
- etc...
Et aujourd'hui la proximité des belligérants autorise aujourd'hui des observations permanentes à partir des positions de chacun, et avec les moyens les plus simples dont dispose tout soldat.
Aussi cette recherche du renseignement, si elle donne naissance à des unités spécialisées, est aussi et surtout l'affaire de tous, dans le contexte d'un front où l'ennemi n'est souvent qu'à quelques centaines de mètres de nos lignes.
Erwan Castel
Position ukrainienne dans un batiment industriel de Promka, ligne de front de Yasinovataya, au Nord de Donetsk, février 2019 |