Faire monter le roi sur son trône

Porochenko recule pour mieux tomber 


Cette rentrée 2016 aura été marquée par un sensible retour au calme sur le front du Donbass, où bien que n'étant pas respecté par Kiev, la trêve décidée le 1er septembre a donné lieu a une diminution importante des violations du cessez le feu (à moins de 100 tirs quotidiens en moyenne)

Parallèlement à cette accalmie militaire relative, ,nous avons pu observer une relance de l'action diplomatique amorcée lors du sommet du G20 en Chine entre les présidents russe francais et allemands et portée par les Ministres des affaires étrangères des deux derniers à Kiev.

Porochenko le dos au mur et au bord du gouffre 

Cette visite qui pour le moment n'a pas encore porté ses fruits est cependant importante car les propositions du Ministre francais Jean-Marc Ayrault et de son homologue allemand Frank-Walter Steinmeier marque un virage important dans le discours tenu par les occidentaux dans ce dossier.
Les occidentaux en effet, alors qu'ils s'étaient jusqu'à présent distingués par un alignement servile sur la politique de Washington et une confiance absolue dans celle menée par Kiev, ont évoqué, au grand dam de Porochenko and Co, pour la résolution du conflit dans la Donbass la nécessité :
  • De valider des élections locales dans le Donbass
  • De mettre en oeuvre la loi d"amnistie
  • D'organiser un statut spécial pour Donetsk et Lugansk
Ceci est certainement la conséquence du sabotage des accords de Minsk et de la mendicité agressive organisés par Kiev et qui finit même par irriter aujourd'hui ses partenaires de l'Union Européenne dont les projets d'investissements en Ukraine attendent depuis 2 ans une stabilisation du pays.

Pour mettre en oeuvre ces 3 points essentiels, Porochenko sera obligé de revenir sur ses propres rodomontades récentes et, provoquant certainement la ire de son aile radicale, engager une réforme de la constitution ukrainienne sans laquelle les accords ne peuvent être mis en oeuvre.

Et c'est là que cela risque de coincer du côté du Président car pour beaucoup d'ukrainiens encore accrochés à l'illusion de l'intégrité territoriale de leur pays aux frontières artificielles en plus d'engager une reconnaissance des Républiques de Donetsk et Lugansk ce serait ouvrir une boite de Pandore car vraisemblablement les autres régions de l'Ukraine demanderaient également l'accès au statut spécial, que ce soit pour des raisons identitaires ou oligarchiques.

En attendant la roue tourne, et "les accords de Minsk doivent maintenant avancer car il n'y aura pas de plan B" martèlent les diplomaties occidentales qui demandent à Porochenko d'engager la réforme constitutionnelle amorçant cette décentralisation avant la fin de l'année
(elle devait initialement être faite avant la fin 2015) 
La balle est donc dans le camp de Kiev qui vient de bénéficier de la réactivation des aides du FMI et du renouvellement des représailles économiques occidentales consécutives au retour de la Crimée en Russie, soutiens que les ministres allemand et francais ont conditionnellement  liés à la mise en oeuvre des accords de Minsk.

L'acceptation de ces propositions occidentales, pour débloquer les accords de Minsk, serait considéré comme une trahison nationale du gouvernement, et ce projet est aujourd'hui jugé inacceptable non seulement par l'aile radicale qui le considère comme un "plan de capitulation" (Oleh Liachko, chef du Parti radical) mais également par le propre parti du Président Porochenko, le Bloc Petro Porochenko, qui considère irréalisable ces accords et accuse même les ministres français et allemand de faire le jeu du Kremlin.

Menacé par son aile radicale qui mène le "parti de la guerre" et par ses oligarques qui veulent protéger leurs fiefs, Porochenko cherche à gagner du temps lâchant du lest millimètre par millimètre pour tenter de conserver son pouvoir. Par exemple il vient d'accepter le processus d'amnistie et de libération mutuelle des prisonniers détenus de chaque côté de la ligne de front. Cette action fait certes partie des accords de Minsk mais surtout c'est un point (et peut-être le seul) sur lequel Porochenko peut espérer obtenir un consensus car concernant aussi la libération des prisonniers ukrainiens les membres du parti de la guerre ne peuvent s'y opposer. Quant aux autres points, qui touchent à des questions territoriales et de souveraineté il probable que leur simple évocation à la Verkhona Rada déclenche de nouveaux pugilats dans la meute des représentants ukrops.


Quand les occidentaux prêchent le vrai pour imposer le faux

Les ministres allemand et francais en visite dans le Donbass ukrainien, avec Pavel Zhebrivsky  (a gauche)
C'est ici que nous pouvons nous demander quelles sont les intentions réelles des représentants occidentaux venus négocier cette hypothétique réanimation des accords de Minsk, d'autant plus que la position des USA, qui restent le chef d'orchestre de la diplomatie occidentale, révèle quant à elle une dissonance importante avec le discours présenté par ses partenaires intervenant à Minsk. En effet, d'une part les tensions entre Moscou et Washington ne cessent d'augmenter comme en témoigne la situation du conflit syrien, et et autre part les faucons étasuniens continuent a pousser leurs pions militaro-industriels en Ukraine et l’encouragent à la guerre (en autorisant la vente d'armes létales à l’Ukraine par exemple)

Donc nous pouvons affirmer que :
  • Fanatiques invétérés du système libéral économique auquel ils se sont volontairement soumis, la France et l'Allemagne espèrent certainement dans une progression des accords de Minsk pouvoir désengager progressivement les représailles économiques contre Moscou et qui les sanctionnent eux-même sérieusement au milieu d'une crise économique déjà grave. Le simple fait de corréler ces "sanctions économiques" anti-russes aux accords de Minsk est révélateur de cet objectif non avoué car ces représailles sont d'abord consécutives au retour de la Crimée et ensuite, la Russie n'est pour rien dans l'enlisement de la situation dans le Donbass.
Mais,
  • L'évolution du pouvoir ukrainien issu du Maïdan en système totalitaire national oligarque ethno centré ne fait que se confirmer et montre que Porochenko n'a joué dans sa réalisation qu'un rôle de préparateur "modéré" politiquement acceptable. Or ce dernier, qui s'accroche désespérément et logiquement à son pouvoir, est devenu aujourd'hui inutile aux ambitions étasuniennes pressées par leur calendrier anti-russe. Il faut donc pour Washington éjecter sa marionnette et passer à l'étape suivante avec des nouveaux fantoches qui en apparence seront plus indépendants de la Maison Blanche à l'image des djihadistes actuels en Syrie qui servent toujours ses intérêts sans en porter les couleurs.
Donc la conclusion pessimiste qui s'impose mais qui malheureusement est hautement probable est que les ministres Ayrault et Stenmeier, sont venus jouer un simulacre de conciliation qu'ils savent voué à l'échec, soit parce que Porochenko va engager une nouvelle stratégie de freinage et saboter encore les accords, soit parce qu'il va subir un inévitable coup d'état en tentant leur passage en force.



Je pense que les occidentaux recherchent la deuxième solution et cherchent à en finir avec l'impopulaire Porochenko qui ne leur sert plus à rien sauf peut-être a provoquer un nouveau coup d'état collabo. Ce coup d'état s'il reste risqué quant à ses suites les déresponsabiliserait d'un retour (espéré mais non avoué) à une guerre inévitable tout en pouvant la limiter à l'Ukraine. 

Enfin et surtout cette perspective conforterait secrètement, par une nouvelle équipe de Kiev plus radicale, la stratégie russophobe étasunienne engagée en Ukraine et que l'échéance électorale américaine et la détérioration de la situation syrienne rendent urgente...

Savchenko, l'hystérique nationaliste ingérable que Poutine a relâché des prisons russes vers l'Ukraine comme on lance une grenade dégoupillée, a d'ailleurs encore récemment appelé à un troisième Maïdan pour renverser Porochenko tout en défendant la décentralisation pour toute le pays qui permettrait le renforcement des fiefs nationalistes et maintiendrait le Donbass, dont elle sait le contrôle militaire impossible, dans l'Ukraine.

Porochenko ne peux plus reculer comme il le fait depuis février 2015, date de la signature des accords de Minsk 2 et doit aujourd'hui assumer ses responsabilités et ses engagements, poussé sur un trône en forme de guillotine par ses parrains occidentaux qui veulent parier sur le pire... Cette tactique de "faire monter le roi sur son trône" pour mieux l'en faire descendre n'est pas pour déplaire aux nationalistes radicaux qui n'attendent que ca pour renverser un président jugé trop faible à leur goût...

En attendant il faut prendre ce qu'il y a à prendre à savoir l'accalmie sur le front qui profite aux familles du Donbass et le possible retour des prisons ukrainiennes des détenus des Républiques de Donetsk et Lugansk dans le cadre de l'amnistie proposée.

Erwan Castel, volontaire en Novorossiya


Rapport de situation hebdomadaire de Christelle Néant

observation : La cause commune étant pour moi supérieure aux délires psychotiques individuels je continuerai à partager le travail de tous les acteurs de la réinformation y compris ceux qui pratiquent à mon encontre une censure ad hominem hystérique...


Plan de la vidéo

SITUATION MILITAIRE
00'34" - Bilan des bombardements ukrainiens sur la semaine écoulée
01'36" - Pertes hors combat ukrainiennes
02'30" - Commandos de l'armée polonaise dans le Donbass et vote du sénat américain
03'29" - Changements récents dans le niveau des bombardements

SITUATION POLITIQUE
04'05" - Accord de désengagement des forces signé à Minsk
05'04" - Proposition écrite d'échange total des prisonniers
06'51" - Approvisionnement en eau de la République Populaire de Lougansk
07'17" - Savtchenko et le pouvoir ukrainien
08'03" - Analyse de l'évolution de la situation en Ukraine
12'11" - La campagne des primaires dans le Donbass

SOCIETE
12'48" - Aide humanitaire de 'armée de la République Populaire de Donetsk à un orphelinat

DIVERS
13'52' - L'enquête sur le crash du MH17

PENDANT CE TEMPS LA A KIEV
16'45" - Le cirque à la Rada
17'20 - Bagarres musclées et menaces entre députés à la télé ukrainienne

CRIMEE ET ELECTIONS EN RUSSIE
18'36" - La position de l'Ukraine concernant les élections législatives russes.
19'53" - Conclusion et rappel concernant le voyage pour les francophones dans le Donbass

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