Le pari suicidaire de Kiev
Dans le Nord du Donbass, les forces russes gardent l'initiative des opérations et, certes très lentement, elles avancent, concédant des pertes régulières qui semblent être le prix à payer pour éviter l'enlisement du conflit dans une nouvelle guerre de positions d'où personne ne sortira vainqueur.
Vue de l'extérieur, ce conflit est très intéressant car il laisse entrevoir l'évolution de la guerre dans cette époque charnière où se côtoient sur le champ de bataille des moyens et tactiques du XXème siècle fondée sur une stratégie de manœuvre massifiée autour de la puissance classique des blindés et de l'artillerie notamment et les technologies post-modernes naissantes comme l'acquisition décentralisée du renseignement, la numérisation du champ de bataille qui rééquilibrent les rapports de forces et augmentant l'espace tridimensionnel du combat au profit d'une fluidité d'unités d'infanterie mécanisées, réduites et polyvalentes et de plus en plus autonomes et mobiles.
Et, après 3 mois de guerre de haute intensité les forces russes et ukrainiennes sont tenues de garder un pied de chaque coté de cette période transitoire de l'évolution militaire pour sécuriser les évolutions stratégiques et technologiques expérimentées sur le terrain, car elles ne sont pas encore suffisantes pour orienter seules le cours des batailles vers la victoire.
Kiev, malgré une défense honorable, est toujours dans l'incapacité de reprendre l'initiative par des contre-offensives territoriales importantes et durables et Zelensky sait pertinemment que tout territoire historiquement russe repassant sous le contrôle de Moscou sera définitivement perdu pour l'Ukraine agonisante.
Aussi l'Etat-Major ukro-atlantiste a t-il décidé semble t-il de s'accrocher le plus longtemps possible et coûte que coûte à ce Donbass russe, fantasmant sur un épuisement militaro-industriel de la Fédération de Russie quand ce n'est pas sur un renversement du gouvernement Poutine.
Plutôt que de se retirer à l'Ouest sur une ligne de défense plus viable le long du Dniepr, l'Etat Major ukro-atlantiste a décidé de s'accrocher et même de renforcer ses derniers bastions du Donbass dont les encerclements par les forces russo-républicaines sont pourtant inéluctables. Ainsi par exemple du bastion ukrainien d'Avdeevka, à 10 km au Nord de Donetsk, qui a reçu en renfort 3 nouvelles unités d'infanterie et un groupe d'artillerie (qui a intensifié les bombardements sur la ville), ou des bastions de Severodonetsk/Lisichansk, Slaviansk/Kramatorsk et Artemovsk/Soledar qui forment l'ossature ukrainienne sur le Front Nord du Donbass.
S'accrocher au front Nord du Donbass est à la fois politiquement logique et militairement insensé car la seule défense de ce triangle compris entre Izioum au Nord, Severodonetsk à l'Est et Gorlovka au Sud capte plus de 14 brigades ukrainiennes si on rajoute les forces auxiliaires des bataillons nationalistes et de mercenaires, soit plus d'un tiers des forces ukrainiennes encore opérationnelles, parmi les meilleures, et dont la destruction serait le coup de grâce achevant l'Ukraine militaire.
En face de ce corps de bataille ukrainien, l'Etat Major russe a déployé, avec les forces républicaines, plus de 50 groupes bataillonnaires tactiques appuyés par une demi douzaine de brigades d'artillerie ainsi que des forces spéciales et auxiliaires comme la garde rouge tchétchène (Groupe "Akhmat") ou des sociétés militaires privées (Groupe "Wagner").
Mais la puissance obtenue par les forces alliées malgré un rapport de force terrestre quasiment équilibré provient surtout de leur parc d'artillerie qui est 2 à 3 fois supérieur à celui des forces ukrainiennes et dispose d'un stock de munitions incomparable.
Le rapport de forces d'assaut sur la ligne de contact est de 1 contre 1 environ mais, alors que les ukrainiens jettent toutes leurs forces dans les batailles, les russes ont d'une part un net avantage dans les appuis feux (artillerie et aviation) et disposent d'une réserve opérationnelle pour mener des offensives décisives. et qui ont permis dans le courant du mois de mai de remporter des victoires décisives pour la suite des opérations :
- Le 7 mai, la conquête de Popasnaya a permis de constituer une tête de pont multidirectionnelle vers Lisichansk, Artemovsk et Gorlovka,
- Le 13 mai, la conquête de Roubijnoe, a engagé l'encerclement par le Nord de Severodonetsk, dont la bataille commencera 1 semaine après,
- Le 27 mai, la conquête de Krasni Liman prive Slaviansk de son point d'appui Nord et permet d'organiser une base arrière pour son encerclement russe.
1 / Dans le secteur de Severodonetsk
Dans la partie occidentale de Severodonetsk les dernières unités ukrainiennes tentent de maintenir une résistance principalement dans 2 secteurs de la zone urbaine:
- A l'Ouest du centre ville, autour de l'usine "Azot", d'où une partie des civils a pu être évacuée. Les combats et les bombardements réciproques (les ukrainiens tirant depuis les hauteurs de Lisichansk) ont redoublé d'intensité selon l'ensemble des observateurs.
- Au Sud du centre ville, autour de l'aéroport et jusqu'à la périphérie de Meltokine, une localité au Sud Est de Severodonetsk qui contrôle la route T1306 permettant d'accéder à la ville par l'Est.
Les survivants de la garnison ukrainienne ont désormais leurs voies de ravitaillement coupées, le pont de Proletarsky ayant été à son tour coupé par les bombardements |
2 / Dans le secteur de Slaviansk
C'est dans le secteur de Slaviansk qu'a eu lieu l'évolution majeure de ce front Nord Donbass, car non seulement les forces russes sont parvenues à conquérir le territoire de Slaviansgorsk que les ukrainiens contrôlaient encore sur la rive gauche de la Donets, mais également à franchir (enfin) cette dernière pour établir deux têtes de pont en direction de Slaviansk dont la périphérie Nord n'est plus qu'à 20 km.
Prétendre comme certains pressés que "la bataille de Slaviansk" a commencé est prématuré, car les défenses extérieures de la ville ne sont pas sur la ligne de contact, même si des bombardements à distance ont commencé à les cibler systématiquement.
des positions ukrainiennes près du
de Raygorodok au Nord Est de Slaviansk
Cette bataille commencera lorsque les forces russes auront pris le contrôle de la route M03 qui mène à cette première ville du plus grand grand bastion ukrainien du Donbass qui avec Kramatorsk fait 70 km2 (contre24 pour Marioupol) et dont le corps de défense est estimé entre 50 000 et 70 000 hommes.
3 / Dans le secteur de Artemovsk
Dans le Sud Est du Slaviansk / Kramatorsk se trouve le saillant russo-républicain réalisé grâce à la libération de Popasnaya, laquelle a ouvert la route vers le Nord (Lisichansk) vers l'Ouest (Artemovsk, Soledar) et vers le Sud (front de Gorlovka).
Aujourd'hui les forces alliées mènent dans ce secteur 3 objectifs :
- Fermer le chaudron de Zolotoe (entre 2 et 4000 ukrainiens) ce qui ouvrira la route vers le Sud de Lisichansk
- Continuer une progression vers le Nord pour contrôler les routes d'approvisionnement entre Kramatorsk et Lisichansk
- Se rapprocher de Artemovsk (Bakhmut pour les ukrainiens) pour l'encercler ainsi que Soledar, ce qui permettra ensuite de continuer vers Konstantinovka
En conclusion
Les brigades d'artillerie russes et républicaines ont intensifié leurs bombardement sur ce front Nord Donbass, touchant par exemple, rien que pour la journée du 12 juin 247 cibles de combat, 13 postes de commandement, 63 positions de tir d'unités dont 7 systèmes de missiles balistiques ukrainiens; annonçant leur intention de doubler leurs efforts pour achever la libération totale des républiques du Donbass
L'enjeu pour Kiev est énorme Abandonner le Donbass reviendrait à une capitulation politique et s'y accrocher revient à sacrifie son meilleur corps de bataille dans une défaite annoncée L'une comme l'autre des options poursuivra la désintégration du pays et accélérera la chute du régime atlantiste de Kiev
Lorsque la chute de Severodonetsk sera actée, il est possible que les crises internes de l'Etat-Major ukrainien se ravivent et redistribuent les cartes décisionnelles à Kiev.
En attendant, les "ukropithèques" continuent de jouer leur rôle d'idiots utiles sacrifiables et sacrifiés sur l'autel de la marchandise mondialiste et, je dois le reconnaitre, avec un certain zèle militaire qui force le respect dûà un adversaire qui se bat jusqu'au bout (il ne faut pas comme certains généraliser tous les combattants ukrainiens aux soudards nationalistes ou aux pleutres qui désertent)
Erwan Castel