"Mieux vaut prévenir que guérir"
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Nous nous sommes adaptés rapidement à notre nouveau secteur qui est intéressant car également sur une zone où les lignes ukrainiennes et républicaines sont "au contact" à quelques centaines de mètres les unes des autres, avec une activité militaire tès importante.
Alors que les forces ukrainiennes sont massées sur l'avant, comme dans tout dispositif d'assaut nostre défense est quant à elle étalée dans la profondeur dans un maillage de petites unité mobiles disposant de capacités antichars renforcées et d'unités d'artillerie en appui. Ce dispositif défensif classique permet d'absorber un choc blindé sans rompre le contact et d'engager un freinage efficace, le temps que s'organise une contre offensive qui soit repousse l'adversaire soit l'enferme dans un chaudron victorieux comme ceux réalisés en 2014-2015 contre des corps blindés ukrainiens pourtant supérieurs en nombre.
Et pour prévenir le plus vite possible une action offensive ukrainienne, nous multiplions les observations et patrouilles vers les avants postes ennemis.
Dimanche 5 mai 2019
Malgré le calme actuel dans notre secteur, nous maintenons nos patrouilles et missions d'observation sur le front pour prévenir d'éventuelles missions ennemies d'infiltration vers nos lignes de défense.
Au sortir de notre base arrière avant que notre étoile se noie au couchant dans des volutes mordorées, nous croisons dans les rues de ce bourg agricole des vaches de retour de pâturages partagés avec des troupeaux de chèvres.
Plus loin, deux couples revenant du cimetière nous saluent en nous offrant des bonbons et biscuits, pour lesquels (chose étrange) nous trouvons encore facilement de la place dans nos poches gonflées.
Une ambiance campagnarde qui pourrait presque nous faire oublier la guerre s'ils n'y avait pas les sangles des armes, des musettes et des brelages tendues par le poids des chargeurs, des lance roquettes et des grenades, qui tirent sur nos épaules disparaissant bientôt sous les feuillages des sentiers.
La noirceur de la nuit nous aide à aiguiser nos sens, tandis que les trottinements et les envolées d'une nature dérangée s'enfuient vers les taillis environnants.
Devant nous des rafales éparses tracent dans la nuit la ligne de front tandis que nous commençons notre observation silencieuse.
Quelques heures plus tard, et revenant d'un front endormi, nous réveillons les braises de notre feu assoupi pour un dernier thé avant un sommeil récupérateur, avant la prochaine sortie...
Au matin, un bouteillon de lait frais et chaud nous attend à l'entrée du jardin...
Erwan Castel