L'appel de la pelle
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"Zakhar" à genou sur le premier sillon de la tranchée, celui ou le pionnier est le plus vulnérable |
Depuis la semaine dernière, après la rotation des unités en première ligne, nous vivons un "repos" plutôt laborieux à quelques centaines de mètres seulement des positions ukrainiennes...
La pelle et la pioche ont remplacé dans nos mains le fusil d'assaut et les jumelles. Elles pour ouvrir de nouveaux sillons, boyaux et tranchées à l'abri des regards ennemis qui battent notre secteur des feux de leurs snipers et qui ont tué cette semaine 2 de nos camarades...
Quelle situation étrange que de s'enterrer pour éviter les enterrements. Mais c'est ainsi, et à la guerre plus qu'ailleurs peut-être, "la sueur épargne le sang".
Dimanche 10 décembre 2017
Couchés ou à genoux, à l'abri des plis du terrain, nous remous la terre du fossé au parapet et sans relâche un siècle après la "der des ders" cette terre européenne. Régulièrement nous interrompons notre labeur pour inaugurer nos tranchées inachevées sous les tirs d'une l'artillerie ukrainienne qui nous encourage à creuser plus vite et profond !
Dans l'après midi je croise Sébastien Hairon effectuant une liaison sous les tirs ukrainiens. Quelques minutes francophones à l'abri d'un pan mur noirci avant de reprendre pelle et fusil vers un horizon tonnant.
Le soir, après quelques heures de repos, une alerte réveille nos corps éreintés pour un sempiternel retour vers ce front, mais cette fois casqués et les armes vers l'avant, dans ce labyrinthe fragile que l'ennemi cherche à nouveau à envahir...
C'est ainsi et depuis toujours que la vie des soldats oscille entre "Grandeur et servitudes"
Erwan Castel
Les autres extraits de ce journal du front peuvent être retrouvés ici : Journal du Front