Le Rebelle et la Mort

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A l'écart de la foule priant la mort de "Green", camarade et ami de Piatnashka, "Rex",  le regard perdu dans ses pensées médite certainement sur la Vie, la Mort et cette guerre du Donbass qui, n'épargnant personne, lui a enlevé se 2 fils. Photo Kristina Melnikova.
Ce matin du 23 janvier, le Soleil, la foule et le froid étaient venus saluer une dernière fois "Green", un officier et camarade abattu à Donetsk 3 jours auparavant, en partance pour son dernier voyage. Plusieurs centaine de personnes, famille, camarades, amis sont venus saluer cet enfant du Donbass dont le courage n'avait d'égal que l'humilité et la gentillesse.

Nous étions nombreux, malgré le froid à être venu communier avec le silence de la steppe et partager tristesses personnelles et pensées métaphysiques autour de la dépouille mortelle d'Alexeï Krivulya.


Vendredi 24 janvier 2020

Alexei s'était engagé pour défendre sa terre natale dès les premiers jours de la résistance du Donbass au coup d'état du Maidan au printemps 2014. Il est au coeur des pires combats de cette guerre, depuis la défense de Slaviansk où il naquit il y a 43 ans, jusqu'à Debalsevo où nous nous croisons très brièvement en février 2015.

Plus tard, evenu officier d'État Major "Green" confirme le sens élevé de l'humain qui guide sa bravoure au combat. Après la Brigade Piatnashka, qui forme son 2ème bataillon, il rejoint l'État Major du Régiment des Forces Spéciales du Ministère de l'Intérieur.

Mais, au soir du 21 janvier cet homme qui affronta le feu des batailles était abattu de 3 balles dans le dos par un individu de la pire espèce, au pied de son immeuble dans le centre paisible de Donetsk. Son lâche assassinat, qui n'est pas sans rappeler ceux des Commandants de bataillon Motorola, Givi et du président Zakharchenko, héros invaincus du Donbass également assassinés loin du front, au cœur de la paisible cité de Donetsk.
Ces ombres criminelles, plus proches de l'insecte rampant que de l'Homme debout, soulignent par leur infamie meurtrière la noblesse d'âme et la force de leurs victimes qu'ils étaient incapables d'affronter simplement du regard.

Autour de nous, des tombes et des tombes recouvertes d'un léger linceul hivernal  bornent nos pensées tandis que fusionnent les vivants et le morts dans le silence des prières et des larmes. Photo Kristina Melnikova

Après un adieu fraternel réalisé à la base Piatnashka, nous avons accompagné "Green" vers son dernier voyage à l'ombre des terrils du Donbass. Là, dans les lisières Sud de Donetsk au milieu d'un champ levé de croix militaires fraîches, la terre s'est refermée sur ce frère d'armes, au son des prières, des pleurs et des salves d'Honneur tirées vers de tristes nuages que déchirait un Soleil accueillant perçant les frimas de la steppe.
Puis, ce fut le traditionnel repas funèbre partagé avec sa famille et ses camarades dans un restaurant du district de Budonivky (Sud de Donetsk) sous le regard d'Alexei accueilli par ses frères d'armes immortels à un autre banquet dans ce royaume élyséen que les coeurs nomment Walhalla, Paradis, Nirvana au gré de leur foi commune et protéiforme.

Cette journée fut pour moi l'occasion du retour au sein de ma famille militaire, après 4 mois de parenthèse hospitalière, et ces adieux funéraires marquèrent ces retrouvailles d'une gravité portant le regard du coeur bien au delà de ce que les sens peuvent percevoir dans le silence gelé d'une lumière irradiant la tristesse des Hommes.

Photo Kristina Melnikova

Ce matin, les photos de Kristina Melnikova, cette jeune mais talentueuse reporter dont le  regard écrit merveilleusement avec la lumière ce que le cœur a souvent du mal à exprimer, m'ont aider à décrire les pensées qui accompagnaient "Green" pour son dernier voyage vers le régiment des immortels.

Car Alexeï Krivulya tout comme Oleg Mamaiev, notre commandeur tué au combat en 2018 et tant d'autres vivants et morts du Donbass, incarne cet Homme libre suivant seul au milieu des siens et de ses principes les chemins de l'Honneur et du Courage. 
"Green", ce vétéran sous un uniforme chamarré par l'or et l'argent de ses décorations, restait drapé de cette humilité qui caractérise la vraie noblesse d'âme d'un individu qui sacrifie tout pour les autres et sa terre.

Entre les tombes saupoudrées de neige immaculée, ce matin là de janvier, l'ombre des nuages me semblaient dessiner la silhouette du Chevalier solitaire chevauchant en compagnie de la Mort et du Diable qu'immortalisa au XVIème siècle le  graveur allemand Albrecht Dürer
Et lorsque la Camarde vient à faucher le soldat au coeur de son engagement, ce n'est pas un corps mort qui est enseveli dans l'obscurité de la tombe mais une graine féconde portée en terre et qui germe dans l'avenir et dans les coeurs des hommes et des femmes restés "debout au milieu des ruines".

Car aujourd'hui dans notre Monde Post-moderne à la dérive, le Rebelle a remplacé le chevalier du Moyen Age, portant à son tour l'héritage ancien de cette civilisation européenne fondée sur les mythes et le sens de la Liberté ouvrant aux hommes la voie de l'Honneur et de la dignité. Et lorsque les chenilles des nouveaux panzers de la Haine labourent les terres noires du Donbass, "Green" et tant d'autres se lèvent comme un seul homme et se portent au devant de leurs canons génocidaires.

En cela il est juste selon moi de qualifier la résistance héroïque du Donbass face à l'Hégémon mondialiste de "rébellion" et ses acteurs civils ou miliciens de "rebelles" dans la définition jüngerienne du terme (Ernst Jünger définit le Soldat, le Travailleur l'Anarque (penseur libre) et le Rebelle comme les piliers et gardiens de toute société voulant rester libre), qu'évoque justement Dominique Venner dans son livre " le coeur rebelle" :

« Comment peut-on être rebelle aujourd’hui ? 
Je me demande surtout comment on pourrait ne pas l’être ! 
Exister, c’est combattre ce qui me nie. 
Etre rebelle, ce n’est pas collectionner les livres impies, rêver de complots fantasmagoriques ou de maquis dans les Cévennes. 
C’est être à soi-même sa propre norme. 
S’en tenir à soi quoiqu’il en coûte. 
Veiller à ne jamais guérir de sa jeunesse. 
Préférer se mettre tout le monde à dos que se mettre à plat ventre. 
Pratiquer aussi en corsaire et sans vergogne le droit de prise. 
Piller dans l’époque tout ce que l’on peut convertir à sa norme, 
sans s’arrêter sur les apparences. 
Dans les revers, ne jamais se poser la question de l’inutilité d’un combat perdu. »

Dominique Venner

Toutes ces qualités, qui font qu'un homme se forge en Homme, "Green" les incarnait avec ses frères d'armes et son sacrifice nous les rappelle haut et fort dans nos coeurs de volontaires et de rebelles ! 

Merci à lui d'avoir ainsi guider par sa bravoure et son humanisme notre engagement commun pour la Liberté des peuples !

Erwan Castel



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