La libération de Severodonetsk avance
A Severodonetsk la situation se précise tant au niveau de la libération de la ville par les forces russo-républicaines qui la conquièrent à l'Est et la contournent au Sud que au niveau de la dichotomie régnant au sein des forces ukrainiennes agitées par des mutineries et des divergences politico-militaires stratégiques.
Je rappelle en préambule que Severodonetsk, au Nord du Donbass, forme avec Lisichansk un bastion urbain ukrainien (le dernier sur le territoire de la République Populaire de Lougansk) à cheval sur la rivière Donets devenue au fil des combat la ligne de contact entre les belligérants. Ce sont des villes industrielles importantes défendues par environ 15 000 hommes et menacées par un encerclement prochain et au centre de toutes les attentions médiatiques car elles sont le bouclier Est de Kramatorsk, où se situe l'Etat-Major du corps de bataille ukrainien dans le Donbass.
Pour commencer ce SITREP, voici une vidéo que vous ne verrai jamais du côté de Washington ou Paris, c'est celle des habitants des quartiers de Severodonetsk déjà libérés et remerciant les soldats russes et républicains d'être venus combattre et chasser les forces ukrainiennes du Donbass.
A propos de média, je tiens à poser ici mon point de vue concernant la disparition de Frédéric Leclerc-Imboff, ce reporter de guerre tué dans un bombardement le 30 mai alors qu'il se déplaçait vers Lisichansk et qui déclenche depuis des torrent de récupérations propagandistes toutes plus délirantes les unes que les autres.
Frédéric Leclerc-Imboff, reporter tué près de Lisichansk le30 mai |
Même si Fréderic Leclerc-Imboff servait BFM-TV, dont la politique éditoriale est l'une des propagandes de la doxa mondialiste les plus caricaturales, il représentait cette liberté d'expression qui doit être défendue même lorsqu'on est opposée aux positions politiques défendues et ce métier de reporter de guerre dont les représentants, de chaque côté du front, font preuve d'un courage physique et mental certain. On pourrait débattre sans fin sur ce qui différencie journaliste et propagandiste mais bien que passionnant l'éthique est ici un autre sujet.
Tout d'abord je tiens à préciser ici et pour dépassionner le débat :
- Fréderic Leclerc-Imboff rejoignait Lisichansk par une route qui depuis 1 semaine est la frappée quotidiennement par des duels d'artillerie entre russes et ukrainiens,
- Qu'il était pas dans un convoi humanitaire officiel comme le prétendent les médias occidentaux, car il y aurait eu un cessez-le-feu et un corridor défini entre les parties,
- Les véhicules collectifs ukrainiens comme celui dans lequel BFM TV se trouvait, s'ils évacuent au retour des civils, ravitaillent aussi à l'aller les forces ukrainiennes,
- L'absence de marquage réglementaire "presse" sur le véhicule ne permettait pas d'informer de la présence de journalistes (protégés par les conventions de Genève),
- L'absence également de marquage réglementaire et communication signalant la mission humanitaire (et non un simple écriteau dans un coin du pare-brise illisible à 100m !).
Lorsqu'apparaissent les nouvelles lignes de front sur une carte de bataille il faut comprendre que les zones annoncées conquises ne sont pas forcément sécurisées et que des poches de résistance où des contre attaques ennemies peuvent y être en cours. Ainsi de Severodonetsk dont 50% de la ville est libérée et 20 à 25 % la zone opérative des assauts en cours où rien n'est encore complétement stabilisé. |
Ce point de situation sur la bataille de Severodonetsk fait suite aux précédents dédiés à ce secteur majeur du front du Donbass, notamment ceux du 19 mai, du 24 mai et du 27 mai ).
1 / Des bombardements sur les défenses ukrainiennes
Comme pour les précédentes batailles urbaines (Volnovakha, Marioupol, Izioum, Popasnaya Krasni Liman...), les forces russo-républicaines précèdent leurs assauts sur la ville de Severodonetsk de puissants bombardements destinés à détruire au maximum les positions défensives ukrainiennes bunkérisées leurs dépôts, casernes, blindés et défense antiaérienne... mais aussi leur moral qui vacille déjà dans les unités mal préparées pour ce type de combats extrêmement violents.
Le problème majeur pour mener ces bombardements est la présence maintenue de civils soit bloqués par les forces ukrainiennes soit refusant de quitter leurs domiciles pour les protéger des maraudeurs soit parce qu'ils travaillent toujours dans la ville (je pense aux personnels médicaux, urgentistes, pompiers notamment). Prétendre que les forces russes visent délibérément les civils tout comme affirmer qu'ils ne sont jamais victimes de leurs bombardements relèvent du débilisme des propagandes manichéistes. C'est la tragédie de la guerre urbaine moderne, où les pertes civiles collatérales sont la conséquence des capacités de destruction exponentielles des munitions.
Le résultat militaire de ces préparations d'artillerie (auxquelles il faut rajouter l'aviation et les missiles) est positif car, côté ukrainien, de nombreuses défenses fixes sur le flanc Nord-Est ont été détruites ainsi que des objectifs militaires "intra-muros" et plusieurs unités (notamment de la Défense Territoriale) ont abandonné leurs positions sur le flanc Sud-Est du bastion ukrainien. Conséquence collatérale négative de cette stratégie d'écrasement des forces ukrainiennes, les destructions importantes dans la ville dont 60% environ des infrastructures ont été détruites.
2 / Des assauts russo-républicains conquérants
3 / Un Etat-Major ukrainien face à un dilemme
En plus de la défense désespérée de la ville, l'Etat Major ukrainien rencontre:
- un premier problème avec un nombre croissant d'unités du premier échelon qui refusent ouvertement d'exécuter leurs missions de combat, en invoquant des carences d'équipements et des incompétences de leur commandement les menant au suicide. Dans un article récent j'avais évoqué cet effondrement moral grandissant parmi les forces ukrainiennes et qui touche autant les soldats mobilisés, territoriaux que les réguliers et professionnels. Désormais les actes de mutinerie ukrainienne revendiqués (mais présentés comme des doléances pour éviter des arrestations immédiates) se multiplient sur les réseaux sociaux ukrainiens .
- Un second problème avec les choix stratégiques du commandement politique qui exige que les forces ukrainiennes de Severodonetsk et Lisichansk se battent jusqu'à le dernière cartouche, alors que la logique et le bon sens militaires commandent au contraire de préserver les forces du secteur encore opérationnelles et de les envoyer renforcer le bastion de Slaviansk-Kramatorsk dont l'enjeu stratégique est nettement supérieur.
- Le troisième problème est, à court terme le risque de voir la garnison de Severodonetsk dans l'incapacité de replier ses moyens vers Lisichansk et, à moyen terme de voir se terminer l'encerclement inévitable du bastion de Severodonetsk Lisichansk dont les dernières voies d'approvisionnement venant de l'Ouest sont déjà battues par les feux de l'artillerie russo-républicaines.
- Le quatrième problème est le ravitaillement des forces ukrainiennes du secteur, l'évacuation de leurs blessés, l'arrivée de renforts éventuels ou leur propre repli car les routes possibles, non seulement diminuent mais celles restant sont désormais sous les feux russes et républicains et le chaudron logistique qui précède toujours le chaudron combattant est déjà quasi fermé.