Se souvenir
Le 8 février 2017, peu après 06h00 du matin, le commandant du bataillon "Somali", Mikhaïl Tolstykh, indicatif "Givi" était tué à son bureau 4 mois après un autre attentat qui avait lâchement assassiné "Motorola", son frère d'armes et commandant du bataillon "Sparta". A la tête de leurs bataillons, "Givi et Motorola avaient été le fer de lance de nombreuses batailles en 2014 et 2015 dont la reconquête de l'aéroport de Donetsk il y a 4 ans au cours de laquelle ils sont entrés dans la légende du Donbass.
"Givi" que j'ai eu l'honneur de rencontrer plusieurs fois était un homme à la fois humble et noble, aimant la vie avec passion et désinvolture autant qu'il affichait au combat une bravoure individuelle et un sens tactique naturel qui lui ont permis de vaincre à de nombreuses reprises, malgré un rapport de force souvent défavorable.
Ce 8 février 2019, j'étais à Spartak lorsque le chef de section est venu nous annoncé la triste nouvelle alors que la disparition de Motorola était toujours vive dans nos mémoires. Le 10 février, avec une équipe de Novorossiya Today nous assistions aux obsèques de cet enfant du pays, né à Iliovaïsk (Sud Est de Donetsk) le 19 juillet 1980. Tout comme pour son frère d'armes Motorola, une foule impressionnante de plus de 100 000 personnes étaient venue dans le froid rendre hommage à celui qui a donné sa vie pour leur liberté.
Un film hommage à "Givi" qui montre les temps forts de son
engagement dans le défense du Donbass jusqu'à sa mort
Et cette série d'assassinats terroristes qui ont emporté dans la terre du Donbass "Mozgovoï", "Dremlov", "Batman", Anachenko, "Motorola", "Givi" et d'autres se poursuit fauchant les uns après les autres les anciens de la rébellion de 2014 qui étaient devenus les "gardiens de la révolution" du Donbass, jusqu'à Alexandre Zakharchenko, le commandeur du bataillon "Oplot" élu président de la jeune République Populaire de Donetsk, et tué lui aussi dans un attentat à l'explosif, le 31 août 2018 à Donetsk.
Au delà des engagements politiques et des circonstances historiques particulières, comme la plupart de ces rebelles s'opposant sur des barrages dérisoires aux blindés ukrainiens avec comme seules armes initiales leur courage physique et leur amour pour la liberté, "Givi" incarne cet Être des peuples contre l'Avoir des marchands. La rébellion du Donbass est en effet celle de la Tradition héritée de la plus lointaine histoire contre une marchandisation amorale et éphémère de la Vie. et les identités culturelles, géographiques et politiques des volontaires venus défendre le Donbass libre prouvent qu'il s'agit bien de ce grand combat séculaire contre l'esclavage d'une pensée unique protéiforme (religieuse, économique, culturelle ou politique) sur le point d'atteindre dans notre post-modernité le paroxysme de son totalitarisme.
Et le Donbass n'est que le reflet particulier de cette guerre ontologique de l'Etre contre l'Avoir, de l'Histoire collective contre l'Intérêt individuel, du cœur contre l'argent. Voilà pourquoi Givi tout comme Motorola, Mozgovoï, Zakharchenko et tant d'autres ne mourront jamais dans nos cœurs et nos bras qu'ils ont renforcé par leurs sacrifices.
8 février 2019, 2 ans après la population du Donbass n'a pas oublié "Givi" et plus de 2000 bouquets de fleurs lui ont été offerts aujourd’hui au cimetière où il repose |
Givi a rejoint le régiment des immortels un 8 février 2017 et ce même jour, mais en 1220, disparaissait Wolfram von Eschenbach qui, avec son "Parzifal" nous a légué un des romans initiatiques les plus forts de la Tradition européenne.
8 siècles plus tard le souvenir de ces héros du Donbass éternellement vivants dans nos cœurs doit nous emplir de joie plus que de tristesse, car ils témoignent de la permanence à travers les âges de l'humanité, de chevaliers et de poètes dont le Graal se nomme "Liberté".
8 siècles plus tard le souvenir de ces héros du Donbass éternellement vivants dans nos cœurs doit nous emplir de joie plus que de tristesse, car ils témoignent de la permanence à travers les âges de l'humanité, de chevaliers et de poètes dont le Graal se nomme "Liberté".
Erwan Castel