Volontaires européens

Photo: Sergey Prudnikov
Au retour de la dernière rotation du front de Promka, Sergey Prudnikov, un journaliste russe du média "Izvestia" m'attendait à la caserne de la brigade Piatnashka. Et nous avons longtemps échangé autour des motivations qui ont poussé un breton de France a quitté sa vie en Guyane pour rejoindre la rébellion du Donbass contre l'agression des putschistes du Maïdan, expression radicale de l'hégémonie mondialiste occidentale lancée contre le monde russe et ses alliés.

Ce conflit du Donbass, même s'il n'a pas provoqué malheureusement l'engouement espéré pour la cause européenne (donc anti-UE), a tout de même réveillé des consciences et drainé des soutiens importants et mê^me des volontariats vers les rangs des milices républicaines dont il faut souligner ici que parmi les premiers occidentaux à prendre les armes pour les jeunes républiques de Donetsk et Lugansk on observe des français emmenés par Victor Lenta dès le deuxième semestre 2014.

Il m'est cependant difficile d'évoquer l'engagement des occidentaux dans le Donbass car d'une part il difficile d'avoir du recul sur une histoire dont on fait partie et qui est toujours en mouvement et d'autre part car cette dernière et particulièrement en ce qui concerne les français est entachée par autant de déception et d’écœurements que d'enthousiasmes et de passions. 

Heureusement que des individus rencontrés également ici par Sergey Prudnikov, comme François Maul d'Aymée sont là pour se démarquer des narcissiques, arrivistes et autres échoués que malheureusement beaucoup de conflits asymétriques aux recrutements peu structurés attirent. Je suis également heureux d'être ici associé à Darko, un volontaire serbe et camarade du bataillon, discret autant qu'efficace dans ses actes et ses pensées.  

Il y a 4 ans, je rejoignais avec une unité de cosaques le chaudron de Debalsevo qui devait s'achever quelques jours plus tard par la victoire des forces républicaines de Donetsk et Lugansk réunies dans la bataille. Une entrée en matière "brève mais intense" avant une intégration au sein de la garde républicaine et un front stabilisé mais jamais éteint par des accords de Minsk morts nés.

Etre volontaire occidental dans le Donbass n'est pas toujours facile car c'est un engagement qui plonge l'individu dans beaucoup d'autres conflits que cette guerre militaire qui saigne les républiques de Donetsk et Lugnask depuis 5 ans. conflit idéologiques, conflit avec ses amis d'hier, conflit avec des choix politiques, conflit avec des jaloux, des calomniateurs et des imbéciles, conflit enfin avec soi-même...

Mais malgré toutes ses difficultés, si cela était à refaire je m'engagerai à nouveau dans les rangs de cette rébellion du Donbass, et plus tôt encore que ce mois de janvier 2015 où j'ai tout abandonné pour rejoindre l'inconnu. Car le Donbass, au delà de la concrétisation d'une révolution conservatrice et une libération des peuples natifs européens pour lesquelles je milite, est devenu pour moi une immense aventure métapolitique, militaire, humaine et intérieure dont je sortirai certainement nouveau... et rajeuni !

Erwan Castel

Observation : en relisant la traduction de l'article, je me suis permis de corriger ou préciser quelques détails d’interprétation, comme par exemple le fait que j'ai appartenu à l'OTAN ce qui est en théorie faux car la France ne l'avait pas encore réintégré quand j'y étais officier et vrai tant la politique étrangère de ses gouvernements (Mitterand à l'époque) l'utilisait déjà au profit d'un complexe militaro-industriel lié à la haute finance internationale. Ensuite pour éviter le quiproquo identitaire et même la confusion sémantique que seul un long développement incompatible avec le format du reportage peut éviter, j'ai pris pour simplifier la France en exemple de "Patrie" pour évoquer l'Europe ressentie comme "matrie". Ma réalité est en effet plus complexe me sentant intimement de nationalité bretonne, de citoyenneté française et d'identité européenne (ce qui est cohérent avec un engagement dans le séparatisme du Donbass). Mais ceci est un autre débat !

"Ceux qui ont choisi le camp des rebelles séparatistes du Donbass – et c’est encore un paradoxe – se sont inscrits dans cette logique. Ils considèrent que la Russie – ensemble multiculturel et multinational – représente la dernière grande force sur le territoire eurasiatique qui ne soit pas encore tombée dans les griffes des Anglo-Saxons. Il ne s’agit pas d’aimer ou de ne pas aimer Poutine, il s’agit d’un raisonnement froid et objectif : l’Europe occidentale, centrale et orientale, et avec elle l’Ukraine, est tombée tout entière dans le camp occidental et l’enjeu de ce Grand Jeu est l’achèvement de la conquête du monde que les élites anglo-saxonnes ont programmé depuis des siècles."


Emmanuel Leroy


Source de l'article : Izvestia

"Je ne pouvais pas rester à l'écart"


Des volontaires européens sur le conflit dans le Donbass, 
le concept de patrie et la chanson russe

Sergey Prudnikov

Le cinquième anniversaire du conflit dans le Donbass approche et il se caractérise par un vaste mouvement international. En 2014-2015, des centaines de recrues du monde entier - de la Serbie au Brésil - ont rejoint les rangs des milices LPR et DPR. Après la conclusion des accords de Minsk et le début de la phase de tranchée de la guerre, leur nombre a considérablement diminué. Cependant, malgré la trêve prolongée, ceux qui ont toujours échangé le confort de leur pays contre une pirogue à l’étranger continuent de se retrouver en position de force. L'envoyé spécial des Izvestia a rencontré des volontaires étrangers et a découvert pourquoi ils étaient venus au Donbass en temps voulu et ne l'ont pas quitté aujourd'hui.


Europe maternelle et France paternelle

L'un de ces volontaires est le Français Erwan Castel, âgé de 56 ans (indicatif d'appel "Alawata"), tireur isolé de la brigade Pyatnashka, ancien capitaine de l'armée de (l'OTAN), l'armée française est arrivé dans le Donbass au tout début de 2015.

«De profession, je suis officier de reconnaissance, de nationalité bretonne», explique Alavata. - Pendant la guerre froide, il participation à la surveillance des bases soviétiques en Europe de l’Est. Il a travaillé avec des légionnaires en Guyane. Après 12 années dans l'"armée française, il a combattu avec les karens en Birmanie. Puis il est retourné en Bretagne, où il a interprété des chansons traditionnelles bretonnes et a repéta animateur de Gouren la lutte traditionnelles lors de célébrations. Et il s'est battu pour l'indépendance de sa région natale.

Erwan Castel (indicatif d'appel "Alawata"), tireur d'élite de la brigade "Pyatnashka", ancien capitaine de l'armée de l'OTAN (armée française) - Photo: Sergey Prudnikov

Au début des années 2000, dit Castel, il s’est rendu en Guyane française pendant 15 ans, où il travaillait en forêt amazonienne comme  dans le petit village de Twenké, de la tribu indienne Wayana. Là, en tant que guide, il a accompagné des groupes de voyageurs et de scientifiques. Périodiquement, l'ancien militaires militaire continuait, avec internet à observer ce qui se passait au-delà des lisières de la jungle sereine. "En 2013, j'ai pris connaissance d'une nouvelle agression du mondialisme à travers le concept de la «révolution ukrainienne de la dignité». Et en 2014, j'ai été témoin d'une guerre à grande échelle en Europe.

«Il était évident pour moi qu'il s'agissait d'un autre coup d'État occidental», a déclaré le Français. - Voyant que les médias occidentaux couvraient la situation en Ukraine de façon unilatérale, j'ai commencé à bloguer en faveur de Donbass et à publier des articles très populaires. Oui, je suis un ancien officier de l'armée française, aujourd'hui retournée dans l'OTAN et j'ai longtemps fait partie du système occidental. Mais au fil du temps, après le bombardement de la Yougoslavie, après les guerres en Afrique, ainsi que la lecture des œuvres de Heidegger, de Karl Schmidt, d'Alain de Benoit, d'Alexandre Dugin et d'autres philosophes, j'ai commencé à regarder ce qui se passait vraiment. L’Occident est aujourd’hui un chef de file du mondialisme - un projet de gouvernement mondial unique, et je ne veux rien avoir à faire avec cela.

La raison de l'arrivée d'Erwan dans le Donbass a été la tragédie d'Odessa et le bombardement aérien de Lugansk avec des roquettes. Il est arrivé dans la RDP au plus fort de l'hiver et est presque immédiatement tombé dans le feu de l'action de Debaltsevo. Il a ensuite pris l'indicatif d'appel "Alawata": les soi-disant singes tropicaux rouges, qui, selon Castel, adorent chanter. Après avoir combattu près de Marinka, dans la région de Dokuchaevsk, dans le Spartak. Depuis 2017, il se tient dans l'une des zones les plus difficiles de la banlieue de Donetsk, dans la zone industrielle d'Avdeevka.

«Les Français, comme les Allemands, ont un concept: la patrie est la terre du père et pour moi c'est la France», explique Alawata. - Mais je pense qu'il existe un concept plus large: la "matrie", la patrie de la mère qui est ici l’Europe, où nous sommes unis par une civilisation commune. Donc, je perçois le Donbass comme faisant partie de l’Europe et donc de ma "matrie". Et je ne pouvais pas rester à l'écart lorsque l'agression contre les républiques a commencé. C'est comme continuer à marcher dans la rue devant une femme en train d'être battue. Oui, beaucoup d'étrangers, y compris les Français, ont maintenant quitté le Donbass. Mais pour moi, rien n'est fini. Parce que la "femme" continue d'être agressée. Si je suis en encore vie, je retournerai certainement en Amazonie, dans ma forêt. Mais pour l'instant ma place est à Donetsk.


"Tout mon être pour vous"

Le serbe Darko Pavlovich a 25 ans. Il est un camarade soldat Alavaty. Il est arrivé dans le Donbass au début de 2015 - il avait à peine 21 ans. Il est venu servir ici via un contact dans l'armée serbe. Les événements monstrueux d'Odessa, et qui vont continué dans le Donbass pendant plusieurs mois, ont aussi marqué un tournant dans sa vie.

Darko, un volontaire de Serbie - Photo: Sergey Prudnikov

- J'ai commencé à chercher des options - comment entrer dans le DPR, - dit Darko. - J'ai signé avec un Serbe, il a déclaré: «Je vais aider». Mais un mois a passé, et aucune nouvelle de  l'autre - le silence. Alors j'ai compris: espérer de quelqu'un n'a pas de sens. J'ai donc pris un billet d'avion pour Moscou, et de là un train jusqu'à Rostov-sur-le-Don. Chez moi, je n'ai parlé à personne de ma décision. J'avais peur que l'information parvienne à la police et je serais retenu à l'aéroport. J'ai appelé ma mère et mon père uniquement à Rostov.

En arrivant à Donetsk, Darko s'est approché des premières personnes en uniforme. Et après quelques jours, il avait déjà été nommé dans le cadre de l'un des régiments qui occupaient ce poste - dans la région de Shyrokyno (Sud de la RPD).

- Ce fut la période la plus difficile, nous avons été continuellement bombardés par des chars, des mortiers, de l'artillerie, des "grads", - se souvient le soldat. - Ensuite, il y a eu Staromikhaylovka, Aleksandrovka (Ouest de Donetsk). Maintenant nous sommes sur le front de Promka (Nord de Donetsk). La situation au front n'a pas beaucoup changé par rapport à la même année 2015. La seule chose - dans les zones résidentielles ne sont pas autant bombardées.

Lorsqu'on lui demande s'il n'est pas fatigué de la guerre de position, il répond: «Oui, c'est difficile. Bombardements. Il fait froid Vous creusez dans le sol glacé ... "

Néanmoins, le combattant Serbe de Donetsk ne va pas quitter l'armée. Et il dit qu'il n'a jamais regretté son arrivée.

- Si j'étais resté à la maison en regardant la guerre à travers les réseaux, j'aurais regretté. Pas besoin de vous tromper. Vous sentez que vous devez y aller - cela signifie que vous devez y aller.

À propos des compatriotes volontaires, la majorité est rentrée chez elle. À Donetsk, il y avait deux ou trois Serbes, le même nombre à Debaltseve. À propos, depuis le début de 2015, Darko n'ai jamais revenu chez lui. D'une part, il n'y a pas beaucoup d'argent pour de tels vols. Mais l'essentiel - je ne veux pas partir. "Tout à lui, comme s'il était né ici." Pavlovich envisage de vivre après la guerre dans le Donbass.


La musique pour vocation

Il y a ceux qui sont arrivés à Donetsk pour se battre, mais, déposant leurs armes, se sont retrouvés ensuite dans une vie paisible. François Maud dʻAymée, 30 ans, originaire de la province de Champagne, fait partie de ces volontaires. Après l’école, il s’inscrit à la prestigieuse Académie militaire de Saint-Cyr et obtient le grade de lieutenant.

François Maud dʻAymée, 30 ans, de France Photo Facebook.com

«Un officier en France est une très noble profession», explique Maud d’Aymée. «À l'Académie, on nous a appris à être irréprochables: honnêtes, courageux, loyaux. Occupez-vous d'autres personnes que vos enfants. Pour protéger le pays, car il n'y a rien de plus élevé. Cependant, quand j'ai réalisé que je devrais participer aux guerres que l'OTAN déclenche dans l'intérêt des grandes entreprises commerciales, voler en Afghanistan et tuer de simples paysans, j'ai compris - non, non, pas ça ! Et j'ai démissionné.

Selon François, il y a aujourd'hui en France une crise d'auto-identification. L'histoire est peu étudiée à l'école, les traditions sont niées. Seuls deux sanctuaires nationaux sont reconnus - la Grande Révolution française et Charles de Gaulle, le reste est en disgrâce. Le respect du passé est une mauvaise forme. Le pays est dirigé par des participants aux troubles étudiants de 1968, partisans du "nouvel homme" - un citoyen du monde. Dans le même temps, de nombreux Français, y compris des jeunes, ne sont pas d'accord avec une telle dictature du mondialisme.

- Pourquoi ai-je choisi le côté du Donbass? - explique le Français. - Parce que les habitants du DNI et du LC protègent leurs terres. Et dans ce sens, ils ressemblent beaucoup à ceux des Français qui ont défendu leur terre au cours des siècles passés. À Donetsk, j’ai retrouvé les valeurs que mes grands-parents avaient et qui ont pratiquement disparu de la génération actuelle.

François a passé six mois aux avant-postes près de Donetsk (y compris dans le cadre de «Quinze»). Cependant, réalisant que la guerre se transforma finalement en une tranchée - démissionnaire. Mais il n'est pas rentré en France.

La milice de la République populaire de Donetsk (RDP)

«J'ai trouvé ma vocation ici: la musique», explique le français - Je pense que les chansons et les romances folkloriques russes révèlent le mieux votre âme et votre caractère. J'avais l'habitude de chanter, alors j'ai commencé à jouer à Donetsk, dans des écoles, lors de festivals, chantant «Je me souviens d'un moment merveilleux», «Nuit noire», «Soirée sur les routes», chanson française. En été, j'ai eu la chance d'entrer à l'Académie de musique de Donetsk, au département de chant académique. Je n'ai pas l'intention de retourner dans l'armée. Tout a son temps. À Donetsk, j'ai maintenant toute ma vie.

Sergey Prudnikov

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