Une soirée sur le front Nord
Chroniques d'Oktyabrsky 10
Devant le regain d'activités militaires sur le front Nord de Donetsk, j'ai décidé de visiter les lisières Nord de mon quartier, cette semaine du côté Est, entre un aéroport qui est bombardé quotidiennement et un village de Spartak où les accrochages et pilonnages sont à nouveau quasi permanents depuis environ 2 semaines.
Au départ je me suis dirigé vers la rue Stratanovtov, cette artère Est-Ouest qui relie Spartak à Peski en longeant la zone aéroportuaire complètement en ruine aujourd'hui. dans cette fine ceinture nord complètement détruite survivent quelques personnes âgées et même à ma connaissance 2 familles dont les maisons, telles des navires que l'on colmatent sans arrêt au milieu d'une tempête, leur offrent encore un abri précaire et dangereux...
Vers 20h00 des bombardements ukrainiens mais également des tirs ont frappé les positions républicaines situées à quelques pas au Nord des dernières maisons en ruines et abandonnées. Il s'en est suivi un échanges de tirs bref mais vif pendant environ 30 minutes
Ambiance des soirées "son et lumière" d'Oktyabrsky
Les rues dans ce quartier sont tellement dévastées et désertes que les personnes croisées semblent être des fantômes surgis d'un passé pourtant proche où les rires des enfants fleurissaient les jardins tandis que leurs parents se réunissaient autour de barbecues odorants...
Au moment où j'emprunte cette petite rue entre le front et la rue Stratanovtov, les 2 ou 3 personnes qui y sont se sont réfugiées derrière les murs épais de leurs maisons, que des balles voire des obus perdus viennent encore frapper régulièrement. Il me semble déambuler dans le décor d'un film où la vie aurait disparu brutalement...
Et pourtant nous sommes bien au coeur de l'Europe et en 2017 ! :
Passant par des raccourcis je rejoins Spartak avant la tombée du jour accueilli ici aussi par des autres tirs ukrainiens qui harcèlent continuellement les positions républicaines et les quelques dizaines d'habitants (sur les 5000 avant la guerre) qui survivent au milieu de leur village martyr.
A Spartak, changement d'ambiance, après avoir salué Vika et sa grand mère, je rejoins la ligne de front en compagnie des soldats qui m'ont invité. Les positions sont aux lisières d'un quartier abandonné où des hangars crevés rivalisent en destructions avec des maisons endommagées.
Quelques instants anonymes quelque part au Nord de Spartak
Pendant ce reportage un sniper ukrainien essaie en
vain de nous toucher, le tir le plus proche (à 1'52")
passant encore à plus de 20 centimètres de sa cible.
Devant nous en direction du Nord se dispersent dans l'horizon les fumées industrielles de la ville d'Avdeevka aujourd'hui occupée par l'armée ukrainienne.
Sur les postes de combat les hommes sereins, la bonne humeur brillant dans tous les regards mais également sont attentifs car les ukrops ont des positions proches à partir desquelles régulièrement dans la journée ils envoient des tirs d'armes légères, mitrailleuses, lance-grenades ou lance roquettes, tandis que leur artillerie située un peu plus loin (Opotne) pilonne également à intervalles réguliers la zone depuis les tranchées jusqu'aux quartiers résidentiels où les derniers habitants vivent dans leurs caves.
Au bout de la rue du village la guerre a dressé un mur de terre, de pierre et de feu |
Au delà, l’étroit "no man's land" devenu le royaume des renards des sangliers et de la mort |
Une vie de spartiate s'organise à l'abri des bunkers |
La foi arme le courage et rappelle aux sentinelles du Donbass qu'ils ne sont pas seuls |
Une vie "au jour le jour" que rythment les gardes, les briefings, les entretiens et les alertes |
Devant les tranchées une zone polluée par la guerre et parsemée de pièges et mines mortels |
Derrière les tranchées, les abris de repos où la popote et les plaisanterie soudent les hommes et soulagent la fatigue |
Spartak, ses ruines, ses habitants et ses défenseurs sont devenus un symbole de la résistance du Donbass |
Ici les habitants et les soldats sont à l'écoute des bruits du monde autant que de ceux de la guerre, et au fil des conversations ils me demandent souvent mon avis sur la diplomatie française qu'ils croient toujours influente sur la géopolitique internationale.
Avec beaucoup de tristesse et même de honte je leur fais comprendre que la dignité française est à l'image de leurs maisons éventrées et ouvertes aux chiens errants à la recherche d'un os à ronger...
Ici dans le Donbass la dignité des hommes et des femmes est en revanche intacte et même certainement renforcée par une détermination et un amour d'une Liberté bafouée par Kiev depuis 3 ans...
Car si les murs sont effondrés sous les assauts de la haine et de la cupidité occidentales en revanche les citadelles intérieures sont toujours là gardiennes de traditions et de libertés européennes victorieuses !
Erwan Castel, volontaire en Novorossiya
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S'il vous plaît, pour m'aider dans le travail de réinformation et l'aide engagée auprès des habitants sinistrés de mon quartier
Si l'argent est le nerf de la guerre il est malheureusement également aussi celui de la réinformation pour laquelle j'ai décidé de me consacrer seul et à plein temps malgré une absence actuelle de revenus et une censure de mon travail par les agences de presse occidentales collabos, mais également par des crapules, jaloux ou obsédés du monopole de l'information venus jouer les vautours dans le Donbass..
Au delà de mes besoins de subsistance (8 000 roubles par mois (150 euros au taux de change local) j'utilise les dons supplémentaires pour aider des personnes isolées et des familles de mon quartier.
Merci d'envoyer vos contributions de soutien sur le compte référencé ci après à partir duquel sont envoyés des virements vers le Donbass
Observation : la plus petite somme (équivalent à celle d'un paquet de cigarette) est la bienvenue et vitale ici.
En vous remerciant par avance de votre soutien moral et matériel
Bien à vous
Erwan