Une mémoire héroïque incarnée

Anna Petrovna, une héroïne au grand coeur 


Lorsque je suis arrivé il y a 2 ans en Russie puis dans le Donbass, j'ai constaté avec un étonnement mêlé de respect la survivance entretenue dans les mémoires individuelles des souvenirs de la "grande guerre patriotique" (1941-1945) à laquelle toutes les familles soviétiques ont des membres y ayant participé.

Début 2014, quand le coup d'état orchestré sur le Maïdan donne la parole à une russophobie fanatique puisant ses slogans propagandistes dans les archives anti-soviétiques nazies, tous ces souvenirs refont surface et invitent alors les populations jetées l'une contre l'autre à une analogie historique, d'autant qu'avec l' "Opération Spéciale Antiterroriste", la crise ukrainienne bascule dans une guerre avec des massacres à caractère génocidaire.

Dans le Donbass, des manifestations populaires aux postes avancés de la ligne de front, les faits d'armes de la Seconde Guerre Mondiale sont souvent évoqués pour alimenter le sentiment patriotique notamment par les témoignages des vétérans 

Anna Petrovna avec ses 95 ans a traversé l'Histoire européenne contemporaine à travers une aventure soviétique vécue de part en part. Cette grand mère qui a su conservé l'étincelle d'une éternelle jeunesse dans les miroirs de son regard, nous a invité à une rencontre dans son appartement situé à Donetsk, près du "rond point du mineur" récemment bombardé par des tirs de lance-roquette multiples le 2 février 2017.

Avec une frêle silhouette qui dénote étonnamment de la force et la mémoire intactes qui l'habitent, Anna Petrovna accueille Zak, Yana et Natalia, une équipe de Novorossiya Today que j'accompagne également pour cette première rencontre que nous propose cette vétérane, avec une Histoire héroïque qu'elle a contribué à écrire.


Lorsque la guerre éclate, la famille de Anna Petrovna décide dans un premier temps de se replier devant l'avancée des troupes allemandes, mais ces dernières étant mécanisée ont tôt vite rattrapé les réfugiés qui se retrouvent bloqués et reviennent vivre en territoire occupé.

"La vie a commencé dans à l'arrière du front contrôlé par les allemands, en arrivant ils se sont tout de suite sentis très à l'aise. Entre les mépris et les pillages de la population locale, nous avons tout de suite senti que nous étions considéré comme des animaux et non des humains"

En mars 43, les allemands ont brûlé le village, tuant la mère et la sœur aînée d'Anna. Malgré sa fragilité, la jeune Anna rejoint alors les partisans et prend part rapidement à la guérilla où elle effectue ses premières missions de combat. Souvent elle s'est trouvée en danger de mort direct comme cette fois où dans un marais presque noyée, blessée à la tête par une balle, heureusement déviée par son calot. 

«J'ai été dans un détachement armé de renseignement dans la profondeur, puis une unité spéciale de l'état major du front qui a fait plusieurs missions derrière les lignes ennemies sur les fronts de la Baltique, Bélarus puis en Ukraine. J'ai participé entre autres à la campagne victorieuse qui a libérée la péninsule de Courlande"

Le courage au combat de Anna Petrovna a été récompensé de plusieurs décorations, notamment l'ordre de la gloire du soldat à l'issue d'une mission effectuée en Lettonie.



Dans l'équipe qui a eu de Novorossiya Today l'honneur de rencontrer cette grande dame de l'Histoire se trouvait mon camarade et ami Zak Novak qui entretient depuis 2 ans une relation privilégiée avec Anna Petrovna, "son héros et mère spirituelle"

Voici ce que ce volontaire serbo-américain venu rejoindre le combat du Donbass il y a 2 ans nous confie :


"C'est Toujours un Jour spécial Lorsque je visite mon Héros et mère Spirituelle Anna Petrovna ! Venant de New York, où j'avais regardé d'incroyables films soviétiques, films sur la Grande Guerre Patriotique, jamais dans mes rêves je n'avais pensé rencontrer un jour un grand Héros de l'Armée Rouge. 

J'ai perdu ma Mère et mon Père, il y a deux ans, et quand j'ai rencontré Anna Petrovna, elle a attrapé ma main et murmura: "je suis votre mère", les frissons couraient le long de ma colonne vertébrale,(...) 

Cela faisait un moment que nous ne nous étions pas vu et j'avais besoin d'être avec elle, quelque chose m'appelait ! Et bien..jeudi dernier, nous sommes arrivés, notre équipe de Novorossia Today et une invitée spéciale, Marina Mikheikina initiatrice du projet "l'Esprit dans le ciel" (ndlr: projet qui présente l'actualité héroïque de la résistance du Donbass dans une continuité de l'Histoire et la permanence des valeurs patriotiques et humanistes héritées).
En arrivant à son domicile. J'ai été le dernier à entrer, son sourire, son étreinte chaleureuse et l'appel, "Mon Fils, Mon Fils !" S'étreignant l'un l'autre comme la Mère et le Fils qui ne se sont pas vus depuis des années ! 

Photo Zak Novak
Qui est Anna Petrovna ? Elle 95 ans héros de l'armée rouge, c'est  un véritable vétéran de la Grande Guerre Patriotique ! Elle a été membre d'une unité d'opérations spéciales et de renseignement largués derrière les lignes ennemies. Ses histoires sont à décrocher la mâchoire, nous tous, immobiles dans nos sièges à l'écouter, sentir chacun de ces instants, qui nous ramène dans le temps ! 
L'histoire de ses soldats n'est pas comme les autres et a atteint la légende ! Elle se décompose alors, les larmes, les pleurs tandis qu'elle continue à rappeler ces moments à couper le souffle de l'histoire ! Nous nous asseyons hypnotisés. Elle essaye de ne pas s'asseoir, en fait, elle préfère se présenter comme elle enfile son uniforme soviétique de l'armée rouge ! Elle est fière, incroyablement puissante ! 

Nous avons enfin parler en privé. Elle me dit qu'elle a rempli sa vie et veut se laisser aller ! J'étais en larmes. 


Non je lui ai-je dit, "pas jusqu'à ce que nous avons fini de vaincre les nazis en Ukraine, une fois pour toutes. !" "
Zak Novak

"L'arme la plus puissante reste le coeur"

Anna Petrovna, qui surprend tous ses invités par sa vivacité intellectuelle et l'étincelle de vie qui brille intacte au fond de son regard pétillant, n'est pas seulement un femme tournée vers le long chemin parcouru, sur les pentes du volcan de l'Histoire, mais c'est aussi une citoyenne de la jeune République Populaire de Donetsk qui suit avec attention et passion l'évolution de son pays, à la fois en guerre et en devenir.



Anna Petrovna espère qu'une victoire proche des Républiques mettra un terme à ce cauchemar que vit aujourd'hui la population du Donbass

Et le regard porté sur cette guerre qui déchire le Donbass par cette vétérane à la veste alourdie de décorations imposant le respect, est à la fois émouvant et symbolique de l'espérance de tout un peuple.

"Comme si une guerre ne suffisait pas, une autre est arrivée me donner rendez-vous
Une nouvelle guerre est arrivée et c'est tellement dur pour moi de la vivre. Dès que 'entends des tirs, je sais qu'il y a quelque part un être qui meure. Quelque chose a explosé... des explosions.... une seule guerre aurait suffit !
Cette guerre est inhumaine. c'est incroyable car les même gens se tirent les uns sur les autres, le père sur le fils, ce sont des choses qui arrivent qu'une même famille soit engagée des 2 cotés du front."

Lorsqu'on demande à celle qui a rampé dans la boue glacée et sous le feu de batailles mythiques en terrassant sa peur et la haine de l'ennemi quel message elle donnerait au jeunes défenseurs du Donbass qui ont repris son flambeau, Anna Petrovna, le regard perdu dans sa mémoire où résonnent encore en écho les fracas des combats nous confie :


"Il faut que vous ayez l'esprit clair et un grand coeur. 
Un grand grand coeur pour tout comprendre par lui, 
avant de comprendre avec le cerveau."

Erwan Castel, volontaire en Novorossiya




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S'il vous plaît, pour m'aider dans le travail de réinformation et l'aide engagée auprès des pauvres de mon quartier 

Si l'argent est le nerf de la guerre il est malheureusement également aussi celui de la réinformation pour laquelle j'ai décidé de me consacrer seul et à plein temps malgré une absence actuelle de revenus et une censure de mon travail par les agences de presse occidentales collabos ... et locales, obsédées par la recherche du monopole de l'information.

J'ai encore réduits mes besoins de subsistance à leur portion congrue (8 000 roubles par mois (150 euros au taux de change local) pour pouvoir aider plus encore des personnes isolées et des familles de mon quartier. 

Merci d'envoyer vos contributions de soutien sur le compte référencé ci après à partir duquel sont envoyés des virements vers le Donbass

Observation : la plus petite somme (équivalent à celle d'un paquet de cigarette) est la bienvenue et vitale ici.

En vous remerciant par avance de votre soutien moral et matériel 

Bien à vous 
Erwan










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