Une grand mère et un petit homme

3ème opération humanitaire sur Oktyabrsky

Les petits gestes quotidiens et les aides aux familles bombardées de mon quartier sont devenus au fil du temps "Un Printemps pour Octobre", projet humanitaire ambitieux et difficile mais que j'espère pouvoir mener à bien grâce à la solidarité d'un réseau de soutien qui ne veut pas que le peuple du Donbass disparaisse sous les bombardements uktrainiens l'indifférence médiatique et la détresse humaine...

Aujourd'hui notre attention s'est portée sur l’extrême précarité de Ludmila et Vladik.


Le 5 avril matin : Réunion avec l'administration locale

Toute la partie Ouest du quartier d'Oktyabrsky dépend du district urbain de Kuybishevsky. Dans le cadre du projet "Un Printemps pour Octobte", je tiens à réaliser les actions humanitaires en coordination avec les autorités civiles en charge du secteur.

Pour ce faire je suis allé le 5 avril 2017 en compagnie de Yulia à la rencontre de Marina Aleksandrovna, secrétaire du chef de l'administration ainsi que de responsables du Service aux familles qui supervisent l'assistance aux personnes victimes de la guerre.

La situation humanitaire malgré l'aide très importante de la Russie, notamment dans la fourniture des matériaux de construction, n'est cependant pas suffisante et les jeunes Républiques malgré des services sociaux d'urgence exemplaires n'ont pas le budget suffisant pour couvrir toutes les dépenses de reconstruction et d'assistance aux personnes. 

Il manque le dernier maillon de la chaîne de solidarité...

Ainsi par exemple, le transport des matériaux depuis les dépôts de la République et la main d'oeuvre pour les réparations des habitats privés sont à la charge des victimes des bombardements, ce qui représente des dépenses hors d'atteinte pour des retraités et des familles à revenu unique.

Lors de cet entretien très amical et instructif où j'ai évoqué la solidarité d'une partie de la population française de plus en plus importante, Marina Aleksandrovna a attiré notre attention sur le cas de Ludmila Ougienko, une grand mère malade vivant seule avec son petit fils de 9 ans dont les parents sont décédés. 

Le soir même nous partons à la rencontre de Ludmila et Vladik qui tentent depuis plus de 2 ans de survivre dans un petit appartement qui a été endommagé par les bombardements ukrainiens qui dans ce secteur sont quasi quotidiens depuis le début du conflit.


Courage et humilité 

Ludmila est une femme aujourd'hui âgée de 70 ans et qui a été institutrice jusqu'en 2014, où, à 68 ans, elle enseignait encore dans l'école primaire du quartier située près de la gare de Donetsk.
Cette femme, qui nous accueille avec dignité dans son modeste appartement où fleurissent en photographies les souvenirs d'un temps meilleur disparu, se souvient de ce 26 mai 2014 lorsque les premiers orages d'acier se sont abattus autour d'elle brisant les vies les murs et les rêves d'Oktyabrsky. Ce jour là les chasseurs bombardiers et l'artillerie lourde de Kiev ouvrent un long chemin de croix borné de bombardements quotidiens qui continuent encore aujourd'hui. 

Un malheur n'arrivant jamais seul, cette femme tombe quelques mois plus tard gravement malade (coeur et tête) qui la contraint depuis à des hospitalisations fréquentes et un traitement lourd dont le coup est exorbitant pour une femme qui doit assurer aujourd'hui sa survie et celle de son petit fils avec seulement une pension de 3000 roubles par  mois (60 euros environ)

Vladik, son petit fils de 9 ans est un orphelin de père et de mère, il vit avec Ludmila qui est pour lui sa grand mère, sa mère et toute sa famille restante. Quand les malheurs surviennent, le regard de ce jeune garçon devient prématurément grave et profond et malgré son jeune âge, il accorde une attention responsable et et protège d'un amour filial extraordinaire cette femme qu'il appelle "Mam" et qui est fragilisée par la maladie et la guerre. Entre l'école et les rares moments de jeux qu'ils s'accordent avant la tombée de la nuit avec ses copains de quartier, le jeune Vladik fait les courses et aide Ludmila pour la cuisine et les tâches ménagères, et lorsqu'elle part pour un de ses fréquents séjours à l'hôpital n° 21 du quartier, aidée dans ses déplacements par des voisins, Vladik parfaitement autonome reste seul à gérer sa vie et l'appartement... 

Ludmila et Vladik nous accueillent avec le sourire et lorsque nous leur demandons comment ils vivent, il n'y a pas une plainte, un reproche, une parole de haine ou de désespoir qui fusent, seulement une narration simple de leur condition de vie digne d'un roman de Zola. Mais lorsque nous leur offrons notre aide et payons les dernières factures médicales, les larmes qui jaillissent trahissent l'épuisement moral et la détresse pudiquement cachées au fond des coeurs.

C'est pendant ces moments là que je vis intensément l'humanité et la noblesse de ce peuple magnifique du Donbass, écrasé par la haine glacée et l'acier brûlant depuis 3 ans mais qui reste debout fidèle à son passé et exemplaire pour notre avenir.


En janvier 2015, le cauchemar continue: alors que les combats pour le contrôle de l'aéroport font rage, le quartier résidentiel où vivent Ludmila et Vladik est soumis à de nombreux bombardements importants et répétés, malgré l'absence d'objectifs militaires à proximité. Les obus des mortiers des obusiers, des chars, les roquettes et les missiles ukrainiens pleuvent dans le quartier, pulvérisant fenêtres et balcons, faisant de nombreuses victimes parmi la population  et dévastant de nombreux appartements et maisons...


Depuis 26 janvier 2015, l'appartement de Ludmila est condamné à la lumière artificielle, les fenêtres brisées ayant été obturées par des planches doublées de couvertures et de cartons pour résister aux hivers rigoureux... Comme évoqué ci dessus, si la Russie via les républiques ont pu prendre en charge les nouveaux matériaux et la réparation des parties collectives des immeubles, en revanche les réparations des habitats privés sont à la charge des sinistrés, et changer plusieurs fenêtres (ici 3 et 1 porte fenêtre sans compter la verrière du balcon) est souvent hors de portée de la majorité de la population de ce quartier populaire.

Lorsque nous rendons visite à Ludmila et Vladik, nous découvrons la situation d’extrême précarité dans laquelle ils vivent et qui les empêchent de retrouver le minimum de confort de vie que réclame la dignité humaine. 
Ce sont surtout  les dépenses médicales qui sont exorbitantes, la seule pension de Ludmila (3000 roubles) ne couvrant même pas 2 semaines de traitement qui est d'environ de 350 roubles par jour.


"De la part des français de France"

Mon intention pour cette nouvelle action humanitaire est de vous proposer d'aider cette famille :
  • En soulageant les dépenses médicales 
  • En réparant les 3 fenêtres de l'appartement
  • En renouvelant des équipements usés de Vladik (chaussures...)
La semaine prochaine (entre le 11 et le 16 avril) un ouvrier va venir faire une estimation précise des travaux de remplacement des fenêtres, que j'espère pouvoir changer au cours de ce mois d'avril. 

Du côté des dépenses médicales, nous avons commencé à prendre en charge lors de cette première visite une partie des factures (2000 roubles) pour reporter la somme sur les dépenses alimentaires.

Depuis le lancement du projet "Un printemps pour Octobre"il y a 5 jours, des personnes ont déjà répondu favorablement à l'appel "10 euros pour un Printemps" et 250 euros ont déjà été virés sur le compte référencé (voir en fin d'article). J'espère que cet élan va continuer et permettre de réunir une somme d'environ 40 000 euros (environ 700 euros) nécessaire pour aider cette famille tout en continuant les actions déjà engagées ailleurs (comme par exemple la prise en charge des transports de matériaux pour les réparations et leur main d'oeuvre)...

Je ne saurais trop remercier celles et ceux qui par leur générosité permettent à l'espérance de revenir dans les coeurs meurtris du quartier d'Oktyabrsky, mais également Yulia cette habitante d'Oktyabrsky qui m'accompagne dans mes démarches, traduisant mieux que personne mes paroles et mes pensées. 

Erwan Castel, volontaire en Novorossiya





Pour lire les autres chroniques et articles sur ce quartier de l'aéroport, le lien ici : Oktyabrsky

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Projet humanitaire pour Oktyabrsky

Lorsque les dons personnel reçus dépassent mes besoins minima de vie quotidienne  je consacre alors le surplus à aider les gens de mon quartier, notamment les personnes âgées et les familles bombardées. S'il est impossible d'aider tout le monde, il est aussi difficile de choisir vers qui diriger es actions importantes tant il y a de personnes prioritaires. Hier par exemple c'était Yulia et Alex pour la réparation de leur maison bombardée (38 500 roubles environ) et aujourd'hui, pour la famille de Luyba, grâce aux dons, j'ai pu déjà leur donner 8000 roubles pour aider au règlement des frais médicaux de leur enfant malade. Mais ce n'est pas assez car ces frais s'élèvent à 50 000 roubles par trimestre sans compter les déplacements vers la ville où est traité l'enfant et qui est située à plus de 200 km. 

Même si la Russie et la République de Donetsk apportent une aide importante notamment pour les matériaux de reconstruction des maisons bombardées, il manque encore pour de nombreuses habitants des besoins importants pour leur permettre de survivre. (alimentation, équipements, vêtements, fournitures scolaires, médicaments,travaux, transports etc...)

Il faut savoir qu'ici la majorité des personnes qui sont restées dans le quartier vivent avec moins de 50 euros par mois et, même si la vie est beaucoup moins chère que dans notre Occident consumériste et décadent, cela ne permet pas malgré tout de restaurer le confort de vie minimum que la guerre a détruit. 

Chaque jour c'est un billet glissé dans la poche d'un mendiant, une facture de gaz payée, ou des réparations réalisées, mais j'avoue que cette aide est autant une pierre de Sysiphe qu'une goutte d'eau dans l'océan... Grâce à la générosité des personnes qui me soutiennent j'ai pu aider une quarantaine de personnes depuis de début de l'année, et je veux continuer et si possible développer cette action.

Si vous voulez aider les gens d'Oktyabrsky, merci d'envoyer vos contributions de soutien sur le compte référencé ci après à partir duquel sont envoyés des virements vers le Donbass, en mentionnant "OKTYABRSKY" et aussi si possible vos coordonnées.

Les dons sont ensuite regroupés et directement adressés aux personnes aidées par mandat Western Union, le seul moyen de faire parvenir de l'argent en international.

Observation: la plus petite somme (l'équivalent d'un paquet de cigarette) est ici la bienvenue et vitale ici.

En vous remerciant par avance de votre soutien moral et matériel 

Bien à vous 


Erwan Castel








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